Une amie partait deux jours
dans la brousse pour son travail. Elle nous avait proposé de profiter de
son 4x4 et chauffeur pour partir à la découverte du Madagascar rural, loin des
sentiers battus. Je n’ai pas hésité une
seconde !
3h du matin, il ne
fait pas encore jour mais nous sommes tous au rendez-vous ; frais et dispo
pour un voyage qui s’annonçait inoubliable.
La destination ? Bin malin qui pourra vous le dire
étant donné que ce sont des régions qui ne sont pas cartographiée. Une seule
consigne ; « vers l’infini et l’au-delà ! » Plus
concrètement nous avons sillonné la jungle de l’Antanosy
« anta’nouche » (région de Fort-Dauphin), le désert de l’Androy
« and’drouille » (l’extrême Sud de l’ile) avec comme étapes Ambosary,
Ambovombe, et la réserve naturelle de Berenthy pour passer la nuit.
Concrètement nous ne sommes allés à plus de 130 km de
Fort-Dauphin, mais il faut que vous compreniez que 130 km malgache ça fait 1300km Français en terme de durée de voyage et de changement de
paysages.
La première partie du voyage, la jungle de l‘Antanosy a été
la plus éprouvante physiquement. En effet, dans cette région, soumise à un régime tropicale (pluies
diluviennes), les routes sont
défoncées par les multiples glissements de terrain, et ravinées par les torrents,
à cela il faut ajouter un relief très montagneux. Rizières, litchiers, papayers, manguiers, avocatiers, il n’y a qu’à tendre la
main pour manger ! Je ne veux pas paraître blasé, mais cette partie du
voyage ne m’a pas tant marquée que ça puisque ces paysages sont désormais mon
quotidien…
Ce qui a été frappant c’est le passage de la frontière entre
Antanosy (FD) et l’Androy. La première
est montagneuse et tropicale, la seconde plate et désertique. La frontière est
radicale et surprenante, elle se fait au sommet d’un col. Je n’exagère pas,
mais quand vous êtes au sommet du col derrière vous on voit la jungle et l’air est chargé
d’humidité, vous avancez de 10 mètres et vous vous trouvez saisi par l’air
brulant et sec du désert.
L’Androy (grand Sud de Madagascar) est un des paysages qui
m’ait le plus marqué : tout le monde à vu la jungle en photo, personne n’a
vu ce désert. L’Androy c’est une
alternance de sable et de terre rouge et une multitude de cactus. Dans l’Androy
il n’y a pas de forêt humide, mais ce qu’on appelle la forêt sèche. La forêt
sèche c’ets des cactus à perte de vue, sur des milliers d’hectares.
En soit elle n’est pas bien haute (1m50 maximum, mais elle est complètement
impénétrable, pas l’ombre d’un 1 cm pour s’y faufiler ; les épines sont
par ailleurs fort dissuasives ! A coté des forêt des cactus, il ya les
forêts de viviracés (je ne connaît pas l’orthographe), ce sont des plantes endémiques de la famille des cactées,
poussant à la verticale jusqu’à 8 mètre de hauteurs, il n’y a rien de plus impressionnants.
Face une forêt de viviracé on se croirait devant un tableau de Dali, ou sur le
plateau de tournage de Star Trek, tellement le paysage est surréaliste et
fantasmagorique.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le désert de
l’Androy est très humanisé. Les champs
de sisal (plante utilisée pour ses fibres dans l’industrie textile de luxe)
couvrent l’horizon d’un bleu outre-mer. De grands champs, délimités par des
barrières de cactus (plus efficace, économique et écolo que le barbelé),
servent à l’élevage du zébu.
Dans cette région, qui est la plus pauvre de Madagascar, les
routes sont très agréables ! En effet, du à la rareté des précipitations,
les pistes de sable sont en très bon état (à l’échelle de Madagascar bien
entendu !). Pour vous dire nous avons fait une pointe à 80km chose
impensable dans le reste de l’île !
Les routes dans l’Androy sont à l’américaine, rectiligne jusqu’à l’horizon, c’est
complètement enivrant. Si les routes sont uniquement fréquentées par un ou deux
4x4 par mois, et 2 taxi-brousses par semaine,
elles sont surpeuplées. Troupeaux de zébus en transhumance, charrettes
de sac de riz tirées par deux gamins de 10 ans, des femmes qui marchent avec
des jerricans d’eau sur la tête. Ce qui est fascinant c’est que le long de la
route il n’y a pas l’ombre d’un village, mais il ya du monde partout, on ne sait pas d’où ils viennent ni où ils
vont.
A notre passage les gens se retournent et nous lancent de
joyeux « Salama » en agitant les mains, tous sont surpris de voir des
Blancs dans cette région déshéritée, nous avons même vu un homme tomber de son
vélo par surprise de voire des touristes ! Mais il ne faut pas se leurrer
et se croire en sécurité, cette région en plus d’être la plus pauvres est l’une
des plus dangereuse de Madagascar, elle est infestée par les Dahals (les
bandits de grand chemins qui font des barrages, détroussent les voyageurs et
les laissent repartir). Ainsi nous ne devions jamais nous arrêter toujours
avancer au même rythme. Si nous nous arrêtions (ne serait-ce que pour se
soulager), nous prenions le risques de tomber nez à nez avec un Dahal derrière
un cactus, où qu’un complice les prévienne qu’une caravane de touriste était
dans la région pour qu’ils nous attaquent plus loin. Par ailleurs, quand un 4x4
s’arrête sur une piste de sable, il est très difficile de le faire repartir car
il lui suffit d’e quelques secondes d’immobilités pour s’enliser.
Pendant le voyage j’ai pris véritablement conscience de
l’importance des ponts. En Occident, on n’y prête guère d’attention, mais c’est
un véritable confort. A certains moments nous étions obligés de faire un détour
de 10 km pour passer au dessus d’un canyon dépourvu de pont, nous avons
également pris un « bac » pour traverser un fleuve dans la jungle. Bac… A vrai dire c’était un
radeau, sur lequel on gare la voiture, deux passeurs le font avancer avec de grandes
perches pendant qu’une équipe de 3 hommes se charge d’écoper…. Un seul pont a
croisé notre route, et celui-ci a une histoire très intéressante. Il a été
dessiné par Gustave Eiffel, mais a été
détruit après l’indépendance. En effet, les gens de la région sont très
francophobes et ont détruit tout ce qui rappelait la France.
Par miracle il a été remplacé directement
après sa destruction, par un pont malgache. Quand le 4x4 s’est avancé dessus,
toute la structure tremblait ; nous avons été obligés de mettre des
plaques de métal (qui sont utilisées en temps normal quand le 4x4 s’enlise dans
le sable) pour combler les trous et éviter qu’une roue ne se coince…
Malgré tout cela, le plus dépaysant a été le moment où nous
sommes arrivés à Ambovombe. Ambovombe est le chef lieu de la région Androy,
elle est surnommée « ville la plus pauvre du monde »… Contrairement à
un imaginaire occidental bien installé, une ville pauvre ne rime pas nécessairement
avec puanteur et saleté. Ainsi Ambovombe était étonnamment propre. Mais après
réflexion ce n’est pas si étonnant : la pauvreté est telle que rien n’est
jeté tout est mangé. Ici le salaire moyen est de 20 000 Ariary/mois soit
environ 6 euros… la pauvreté était particulièrement accentué quand nous sommes
arrivés car février est la période de soudure. La soudure c’est l’époque où il
n’y a plus de riz dans les greniers et qu’il est trop tôt pour procéder à la prochaine
récolte de riz. Dans les grandes villes comme FD, il est possible de trouver du
riz pakistanais sur le marché, mais dans les villes de brousse les gens n’ont
strictement rien à manger c’est la famine. Ils se nourrissent donc de galette
de terre, de pulpe de cactus et de raquettes. La raquette, autrement appelée
figue de barbarie, est le fruit du cactus. Comme il n’y avait que ça à manger j’ai
gouté. De prime abord, j’étais franchement dubitatif, le fruit du cactus, le
fruit du désert se devait d’être filandreux et sec. Cependant, une fois que la
coquille piquante est épluchée, vous avez dans les mains un fruit vert, juteux
et fondant, similaire en tout point à un
kiwi. Vraiment délicieux !
Quand vous arrivez à Ambovombe, on se croirait sur le plateau
de tournage d’un western. Ici il n’y pas l’once de goudron, ni de béton. Les bâtiments
sont tous en bois, le sol est couvert de
sable, des rangées de cactus bordent élégamment les rues. Quand nous sommes
descendus du 4x4, la ville s’est figée, les regards se sont tournés vers nous,
seul le sable soulevé par les bourrasques de vent procurait de l’animation à la
ville. Dans les regards pas d’hostilité, seulement de la crainte. Un local nous
expliquera par la suite que la ville a été saccagée la semaine précédente par
une horde de Dahal. Ils arrivent, ils pillent, ils cassent tout et repartent
avec le souffle du désert… comme dans les films
Enfin la dernière étape de notre voyage a été la réserve
naturelle de Bérenthy. Située sur les rives du fleuve Mandrare, c’est un
véritable havre de paix. La spécificité de cette réserve c’est qu’elle est à cheval
sur deux milieux naturels opposés. La forêt sèche et la forêt humide. Nous avons eu la chance de faire 3 visites
dans la réserve. Une dans la journée, une au milieu de la nuit, et une à l’aube
pour observer la vie de la nature aux différents moments de la journée. La nuit
nous sommes allés dans la forêt sèche ; comme c’était la pleine lune, les
ombres des cactus donnait à l’espace une atmosphère fantastique assez
effrayante. A l’aube nous avons été dans la forêt humide, qui dégoulinait de
boa… Des immenses boas, accrochés aux
branches, rampant sur le sol. J’ai manqué de peu de marcher sur boas qui
faisait sa sieste sur le chemin… Sensations garantie ! Le moment le plus
émouvant a été la visite aux baobabs le plus anciens avait 1600 ans ! Rendez-vous
compte cela veut dire qu’il est né en l’an 300 !
Bon aller, je crois que vous avez un bon résumé de mes
aventures dans la brousse ! a bientôt !