samedi 15 février 2014

Road-trip aux airs de western spaghetti

Une amie partait deux jours  dans la brousse pour son travail. Elle nous avait proposé de profiter de son 4x4 et chauffeur pour partir à la découverte du Madagascar rural, loin des sentiers battus. Je n’ai pas  hésité une seconde !

3h du matin,  il ne fait pas encore jour mais nous sommes tous au rendez-vous ; frais et dispo pour un voyage qui s’annonçait inoubliable.

La destination ? Bin malin qui pourra vous le dire étant donné que ce sont des régions qui ne sont pas cartographiée. Une seule consigne ; « vers l’infini et l’au-delà ! » Plus concrètement nous avons sillonné la jungle de l’Antanosy « anta’nouche » (région de Fort-Dauphin), le désert de l’Androy « and’drouille » (l’extrême Sud de l’ile) avec comme étapes Ambosary, Ambovombe, et la réserve naturelle de Berenthy pour passer la nuit.

Concrètement nous ne sommes allés à plus de 130 km de Fort-Dauphin, mais il faut que vous compreniez que 130 km malgache ça fait  1300km Français en  terme de durée de voyage et de changement de paysages.

La première partie du voyage, la jungle de l‘Antanosy a été la plus éprouvante physiquement. En effet, dans  cette région, soumise à un régime tropicale (pluies diluviennes),  les  routes sont  défoncées par les multiples glissements de terrain, et ravinées par les torrents, à cela il faut ajouter un relief très montagneux.  Rizières, litchiers, papayers,  manguiers, avocatiers, il n’y a qu’à tendre la main pour manger ! Je ne veux pas paraître blasé, mais cette partie du voyage ne m’a pas tant marquée que ça puisque ces paysages sont désormais mon quotidien…
Ce qui a été frappant c’est le passage de la frontière entre Antanosy  (FD) et l’Androy. La première est montagneuse et tropicale, la seconde plate et désertique. La frontière est radicale et surprenante, elle se fait au sommet d’un col. Je n’exagère pas, mais quand vous êtes au sommet du col derrière vous  on voit la jungle et l’air est chargé d’humidité, vous avancez de 10 mètres et vous vous trouvez saisi par l’air brulant et sec du désert.
L’Androy (grand Sud de Madagascar) est un des paysages qui m’ait le plus marqué : tout le monde à vu la jungle en photo, personne n’a vu ce désert. L’Androy c’est  une alternance de sable et de terre rouge et une multitude de cactus. Dans l’Androy il n’y a pas de forêt humide, mais ce qu’on appelle la forêt sèche. La forêt sèche  c’ets des cactus  à perte de vue, sur des milliers d’hectares. En soit elle n’est pas bien haute (1m50 maximum, mais elle est complètement impénétrable, pas l’ombre d’un 1 cm pour s’y faufiler ; les épines sont par ailleurs fort dissuasives ! A coté des forêt des cactus, il ya les forêts de viviracés (je ne connaît pas l’orthographe), ce sont des  plantes endémiques de la famille des cactées, poussant à la verticale jusqu’à 8 mètre de hauteurs, il n’y a rien de plus impressionnants. Face une forêt de viviracé on se croirait devant un tableau de Dali, ou sur le plateau de tournage de Star Trek, tellement le paysage est surréaliste et fantasmagorique.

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le désert de l’Androy est très humanisé.  Les champs de sisal (plante utilisée pour ses fibres dans l’industrie textile de luxe) couvrent l’horizon d’un bleu outre-mer. De grands champs, délimités par des barrières de cactus (plus efficace, économique et écolo que le barbelé), servent à l’élevage du zébu.

Dans cette région, qui est la plus pauvre de Madagascar, les routes sont très agréables ! En effet, du à la rareté des précipitations, les pistes de sable sont en très bon état (à l’échelle de Madagascar bien entendu !). Pour vous dire nous avons fait une pointe à 80km chose impensable dans  le reste de l’île ! Les routes dans l’Androy sont à l’américaine, rectiligne jusqu’à l’horizon, c’est complètement enivrant. Si les routes sont uniquement fréquentées par un ou deux 4x4 par mois, et 2 taxi-brousses par semaine,  elles sont surpeuplées. Troupeaux de zébus en transhumance, charrettes de sac de riz tirées par deux gamins de 10 ans, des femmes qui marchent avec des jerricans d’eau sur la tête. Ce qui est fascinant c’est que le long de la route il n’y a pas l’ombre d’un village, mais il ya du monde partout,  on ne sait pas d’où ils viennent ni où ils vont.
A notre passage les gens se retournent et nous lancent de joyeux « Salama » en agitant les mains, tous sont surpris de voir des Blancs dans cette région déshéritée, nous avons même vu un homme tomber de son vélo par surprise de voire des touristes ! Mais il ne faut pas se leurrer et se croire en sécurité, cette région en plus d’être la plus pauvres est l’une des plus dangereuse de Madagascar, elle est infestée par les Dahals (les bandits de grand chemins qui font des barrages, détroussent les voyageurs et les laissent repartir). Ainsi nous ne devions jamais nous arrêter toujours avancer au même rythme. Si nous nous arrêtions (ne serait-ce que pour se soulager), nous prenions le risques de tomber nez à nez avec un Dahal derrière un cactus, où qu’un complice les prévienne qu’une caravane de touriste était dans la région pour qu’ils nous attaquent plus loin. Par ailleurs, quand un 4x4 s’arrête sur une piste de sable, il est très difficile de le faire repartir car il lui suffit d’e quelques secondes d’immobilités pour s’enliser.

Pendant le voyage j’ai pris véritablement conscience de l’importance des ponts. En Occident, on n’y prête guère d’attention, mais c’est un véritable confort. A certains moments nous étions obligés de faire un détour de 10 km pour passer au dessus d’un canyon dépourvu de pont, nous avons également pris un « bac » pour traverser un fleuve  dans la jungle. Bac… A vrai dire c’était un radeau, sur lequel on gare la voiture, deux passeurs le font avancer avec de grandes perches pendant qu’une équipe de 3 hommes se charge d’écoper…. Un seul pont a croisé notre route, et celui-ci a une histoire très intéressante. Il a été dessiné par Gustave  Eiffel, mais a été détruit après l’indépendance. En effet, les gens de la région sont très francophobes et ont détruit tout ce qui rappelait  la France.  Par miracle il  a été remplacé directement après sa destruction, par un pont malgache. Quand le 4x4 s’est avancé dessus, toute la structure tremblait ; nous avons été obligés de mettre des plaques de métal (qui sont utilisées en temps normal quand le 4x4 s’enlise dans le sable) pour combler les trous et éviter qu’une roue ne se coince…

Malgré tout cela, le plus dépaysant a été le moment où nous sommes arrivés à Ambovombe. Ambovombe est le chef lieu de la région Androy, elle est surnommée « ville la plus pauvre du monde »… Contrairement à un imaginaire occidental bien installé, une ville pauvre ne rime pas nécessairement avec puanteur et saleté. Ainsi Ambovombe était étonnamment propre. Mais après réflexion ce n’est pas si étonnant : la pauvreté est telle que rien n’est jeté tout est mangé. Ici le salaire moyen est de 20 000 Ariary/mois soit environ 6 euros… la pauvreté était particulièrement accentué quand nous sommes arrivés car février est la période de soudure. La soudure c’est l’époque où il n’y a plus de riz dans les greniers et qu’il est trop tôt pour procéder à la prochaine récolte de riz. Dans les grandes villes comme FD, il est possible de trouver du riz pakistanais sur le marché, mais dans les villes de brousse les gens n’ont strictement rien à manger c’est la famine. Ils se nourrissent donc de galette de terre, de pulpe de cactus et de raquettes. La raquette, autrement appelée figue de barbarie, est le fruit du cactus. Comme il n’y avait que ça à manger j’ai gouté. De prime abord, j’étais franchement dubitatif, le fruit du cactus, le fruit du désert se devait d’être filandreux et sec. Cependant, une fois que la coquille piquante est épluchée, vous avez dans les mains un fruit vert, juteux et  fondant, similaire en tout point à un kiwi. Vraiment délicieux !
Quand vous arrivez à Ambovombe, on se croirait sur le plateau de tournage d’un western. Ici il n’y pas l’once de goudron, ni de béton. Les bâtiments sont tous en bois,  le sol est couvert de sable, des rangées de cactus bordent élégamment les rues. Quand nous sommes descendus du 4x4, la ville s’est figée, les regards se sont tournés vers nous, seul le sable soulevé par les bourrasques de vent procurait de l’animation à la ville. Dans les regards pas d’hostilité, seulement de la crainte. Un local nous expliquera par la suite que la ville a été saccagée la semaine précédente par une horde de Dahal. Ils arrivent, ils pillent, ils cassent tout et repartent avec le souffle du désert… comme dans les films

Enfin la dernière étape de notre voyage a été la réserve naturelle de Bérenthy. Située sur les rives du fleuve Mandrare, c’est un véritable havre de paix. La spécificité de cette réserve c’est qu’elle est à cheval sur deux milieux naturels opposés. La forêt sèche et la forêt humide.  Nous avons eu la chance de faire 3 visites dans la réserve. Une dans la journée, une au milieu de la nuit, et une à l’aube pour observer la vie de la nature aux différents moments de la journée. La nuit nous sommes allés dans la forêt sèche ; comme c’était la pleine lune, les ombres des cactus donnait à l’espace une atmosphère fantastique assez effrayante. A l’aube nous avons été dans la forêt humide, qui dégoulinait de boa…  Des immenses boas, accrochés aux branches, rampant sur le sol. J’ai manqué de peu de marcher sur boas qui faisait sa sieste sur le chemin… Sensations garantie ! Le moment le plus émouvant a été la visite aux baobabs le plus anciens avait 1600 ans ! Rendez-vous compte cela veut dire qu’il est né en l’an 300 !


Bon aller, je crois que vous avez un bon résumé de mes aventures dans la brousse ! a bientôt !

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